mercredi 21 décembre 2016

avec Françoise Pétrovitch (1)

Françoise Pétrovitch vient de s’installer dans un magnifique atelier, tout dernièrement aménagé en son bout du monde, dans la banlieue parisienne.. le lieu est inondé de lumière, vaste et parfaitement accueillant. Je suis passée ce jour là pour regarder, découvrir.. juste regarder les oeuvres prendre naissance sous cette belle voûte créatrice. Un collectionneur pousse toujours ainsi les portes de ces lieux paisibles, refuges de grande solitude pour l’artiste et d’inattendu pour le passant un peu animé par une envie impalpable de « surprise », d’étonnement.. de ce petit frisson intérieur qui, sans intention, débroussaille un bout de chemin parmi les strates d’états d’âme.. une aventure !! oui je pense qu’il s’agit d’une aventure..
Le printemps est là. Je me souviens les crocus sortaient de terre..

Quelle surprise m’attend une fois le seul franchi ?.. Il y a tout d’abord le silence et ce ton murmuré qui se calque sans entrave sur l’atmosphère recueillie des lieux !! tout est impeccable, telle une chambre d’enfant méticuleusement rangée avant un nouvel anniversaire, un presque Noël.
Il y a surtout le papier, partout, beau, blanc, aux grains parfaitement sélectionnés par l’artiste.. Il y a la fragilité de l’eau enroulée dans les couleurs délavées.. il y a le dessin, il y a la trace !! il y a tout simplement la présence d’un travail énorme, sans relâche d’inspiration, aucunement.. Il y a la beauté.
Il y a surtout l’émotion, une émotion timide au regard de  " tout ça " .. les dessins disent l’enfance, ils disent les animaux familiers, les lapins, les oiseaux, ils disent les éclats de moments capturés sur les rayonnages du temps.. il y a une sourde résonance avec ce qui, au fond de moi, demeure blotti dans l’inquiétude d’être révélée.. il y a tout ça, là, au grand jour sans dérangement aucun de cet atelier..
L’artiste ouvre de vastes tiroirs, dérange avec de délicates attentions le papier de soie, ou le papier calque, ces feuillets de transparence protecteurs des oeuvres.. Mon regard devient silencieusement bavard.. Il plonge derrière le dessin, recherche la matière et cette intention imperceptible mais totalement exprimée de l’artiste.. ou bien c’est moi qui, dans cet état de presque hypnose, pioche au fond de mon être des vagues de mémoires fanées et soudainement animées…

Le bonhomme de neige apparaît, ronde boule blanche poudrée pétrie par des mains enfantines.. oui ses bras sont ces deux branches dénudées et noueuses ramassées un jour d’hiver dans une allée de tilleuls argentés.. et la carotte vient d’être déterrée directement de ce lit de sable déposé dans la réserve des outils de jardin, dans l’obscurité. C’est ainsi que ces tubercules orangés passaient l’hiver.. jadis !!.. et le ciel bien sûr est cotonneux !!
Eternel bonhomme de neige..

 Françoise Pétrovitch - Bonhomme de Neige, 2013
© Collection IdL

lundi 19 décembre 2016

avec Bill Culbert

L'été je pense ronronnait sous les poiriers de " chambre avec vue ", là bas au bout du Luberon.. j'étais venue cueillir quelque fraîcheur au verger.. l'eau gargouillait au creux de ce petit ruisseau façonné par un artiste.. l'herbe était donc verte et n'avait pas succombé aux allures de paille qui soudain avaient tapissé la campagne de ce bout de sud par ailleurs particulièrement assoiffé.. les fruits à maturité ricochaient de temps à autre sur une table de bois à la solide élégance campagnarde..une guirlande de chaises aux tons fanés, mais ô combien " tendance" , gambade autour de cette espace convivial, ô combien!! ce doit être dimanche!! disons que c'est dimanche..
Des artistes sont là en résidence, des amis toquent à la lourde porte de la bâtisse et font escale au jardin.. au fil des heures, un couvert est dressé, savoureux et tellement généreux.. une bouteille de vin se débarrasse de son bouchon.. L'ombre du flacon s'affale sur le bois.. et là, Bill Culbert, discrètement attablé, saisit un appareil photographique et j'observe sa façon, avec la délicatesse muette d'un chat, de s'approcher de cette oeuvre, duo magnifique entre une bouteille de vin et son ombre. J'écoute alors les dire de Bill.. l'ombre et la lumière.. l'éclat.. ce pas deux improvisé.. le vert profond du flacon,  l'ombre sombre de sa silhouette allongée sur le bois. Clic clac.. l'oeuvre est !
Je comprends alors.. l'ombre et la lumière, les deux inséparables qui jouent au jour et à la nuit, aux éclats de rires et aux secousses de larmes.. oui la lumière est ombre. L'ombre est lumière. Une réconciliation!

Nous parlons, longtemps, sans bruit.. Bill évoque alors son travail. Je découvre ses créations articulées souvent autour du néon.. des bidons de plastiques alignés réunis par cette barre lumineuse, des chaises transpercées par cet éclair jaune.. il est aussi des valises !!
Une valise de voyage, Samsonite, indifférente et parfaitement banale.. la valise de tout le monde ..la valise qui prend l'avion et s'enfuit sur les tapis roulants des salles d'embarquements.. destinations inconnues.. confusion de tous ces départs, de tous ces retours.. des étiquettes articulent des noms de villes codifiés.

J'aime les valises.. des boîtes aux serrures.. pour les secrets.. les mystères.. je les soustraie souvent aux installations des antiquaires ou des brocanteurs.. elles me parlent de voyages imaginaires.. de ceux peut être rêvés au fond d'une cabane de l'enfance ou de ceux, irréalisables - mais si c'est pas sûr, c'est quand même peut être elles qui me transporteraient en des ailleurs improbables.. et vains !!

La valise au néon reste allumée sur mon plancher de chêne.. ma lumière ! petit faisceau rassurant.. nous nous évadons ensemble, quelquefois.. sur un tapis volant!
Nous revenons toujours, là !

Bill Culbert - Valise et néon, 2009 -
© Collection IdL






vendredi 16 décembre 2016

avec Pip Culbert en 2009 (3)

L'automne a déjà dévêtu nos campagnes.. quelques fruits presque squelettiques hésitent encore à rejoindre le tapis de feuilles rousses mises à terre.. une jonchée que nous nous surprenons toujours à piétiner..  un craquèlement enfantin radieux murmure alors la symphonie délicieuse d'autres automnes..
Mais ce jour d'octobre, ou de novembre peut-être, je suis au verger, à Saignon, chez Pierre et Kamila.. j'ai découvert ce lieu il y a peu.. là, j'ai pris doucement des habitudes d'escales en chambre d'hôtes.. être а la campagne..  vous savez.. pour un feu de cheminée, une balade dans les bois ou les champs de lavande, sous la haute protection du labrador au manteau champagne.. pour glisser aussi mes pieds  dans des godillots déformés, ces souliers toujours en attente dans une entrée.... la boue est là aussi, belle empreinte des pas, de la terre.
Ce jour donc, je déambule en ce verger.. les confitures ont été patiemment cuites, les fleurs cueillies ou séchées, les graines récoltées.. Une saison intermédiaire, immobile, juste suspendue aux rafales du vent et aux avalanches de pluie qui, sans tarder, gribouilleront cette palette de flanelle. Le bois aura été rentré.. l'hiver alors sera..
Là, au fond de ce verger, sous la protection bienveillante de ces fameuses pommes - ou poires - en fin de saison, deux chaises côte à côte. Non pas vraiment côte à côte plutôt posées en biais, le regard de l'une s'orientant vers l'autre, en angle droit.. les assises se frôlent, osent.. de veilles gabardines accaparent ces drôles de personnes, mi-vagabonds, mi- épouvantails.. des parures trop vastes, bien trop vastes pour ces carcasses décharnées.. soudain pour moi ces deux chaises de jardin décolorées par trop d'étés, par trop d'hivers, sont devenues " mes " deux personnages.. un dialogue muet mais tellement assourdissant.. tant de temps ensemble..
Il s'agit de Conversation, œuvre de Pip Culbert.
Galopent alors dans mon esprit de multiples interrogations sur " deux ", cet étrange et merveilleuse association de deux êtres qui clopin clopant traversent la vie.. demeurent la complicité, le frôlement des tissus, d'un genou.. un regard..  ils se tiennent encore la main et leurs peaux sont devenues trop grandes.. chut.. ils ont une histoire!..
Cette Conversation se poursuivra sur mon plancher de chêne.. venez les écouter!! ils disent encore tant..


Pip Culbert - Conversation - 2009
© Collection IdL 





jeudi 1 décembre 2016

avec Marcus Kreiss, Sophie Braganti, Soutard

C'est un soir de juillet  2012.. la lumière va bientôt s'absenter derrière l'horizon, là-bas, plein ouest.. Je viens du sud..

Ma petite carriole, étonnante roulotte d'une transhumance estivale, déborde de tous " mes " nécessaires, vaste inventaire biscornu qui animera, je sais, mon campement estival.. trois semaines au bord de l'océan, de l'Océan Atlantique, mon tremplin de joie et de vie balloté par les écumes et les coquillages, les prouesses des nuages, la dignité de la Dune du Pyla.. et la mélancolie du bassin, grande baignoire d'eau inlassablement dérangée par les mouvements perpétuels des marées.. six heures d'absence et le découvrement alors d'un tapis vaseux pigmenté de bigorneaux ébènes et de crabes boiteux.. six heures aussi d'eau immobile plantée alors des piquets sombres et moussus des parcs à huîtres.. sortes de sillons kidnappés à l'alignement des vignobles ! flottent alors les pinasses, vastes barques plates, de noir de goudron badigeonnées, bateaux des ostréiculteurs, les paysans des mers !!
C'est un véritable jardin, celui qui fut cet étonnant terrain de jeux et de découvertes, lorsque, enfant, une grand-mère de terrain nous conviait à savourer lа nos grandes vacances.. les rites du mois de juillet reprenaient alors, sans monotonie, petites merveilles qui scandaient nos jours et rassuraient les doutes du temps en partance..

Ce soir là, j'avais déjà récupéré la clé de cette grande maison de bois dénichée l'hiver précédent.. le vin de l' Entre deux Mers avait été livré..  en blanc, en rosé, en rouge.. de quoi colorer de plaisir les joues de ma petite troupe !
Les bicyclettes reposaient contre le grand pin..
Demain, et les jours suivants, mes amis, mes enfants, mes artistes..  arriveront, doucement, à leur rythme.. Ils sont tous convoqués pour réaliser un petit film, une vidéo d'art qui retiendra les dernières traces d'une maison de famille..  notre maison, celle de nos ancêtres depuis la Révolution, celle qui retiendra pour longtemps - pour toujours? - tous ces immenses minuscules qui se sont imprimés alors sur les murs, entre les portes, derrière les fenêtres, sous les carreaux de terre cuite ou du plancher à la française.. cette demeure emplie de toutes les imperfections que le temps, ce maître, a gravé sans camouflage, ni masque, aucunement.. Une demeure dans toute la brutalité de sa sincérité. Belle, juste belle, recroquevillée sous les empreintes de tant de saisons..

Marcus Kreiss est là, en famille. Il assurera le scénario et la musique de ce petit film. Nous nous sommes souvent rencontrés pour évoquer ce travail.. j'avais alors déroulé les rubans de mes mémoires.. lui seul est désormais  responsable d'essorer tout ça et de ne conserver que la dignité d'un au revoir sincère, sans dramaturgie aucune !..
Kamila Regent s'installera aussi dans une des cabanes de la maison de vacances. Kamila est galeriste.  Elle me présenta un jour Marcus. Elle sera notre coordonatrice, le chef d'orchestre du projet.
Mes quatre enfants s’éparpillent et puisent dans ce rassemblement les délices de véritables vacances familiales. Leurs amis vont et viennent, les bicyclettes s’éclipsent et reviennent.. les paniers et autres corbeilles de rotin regorgent vite de coquillages nacrés, inévitables cueillettes des bords de mer.. la grande table au-dessus du bassin est infinie.. nous sommes douze, nous sommes quinze, nous sommes dix !! la joie déborde, les rires ricochent sur les grands arbres, un ballon bondit de temps à autre et bouscule les verres.. Un piano, dans la vaste pièce, égrène ses notes.. il y a toujours un apprenti musicien de passage !!
Il y a Sophie Braganti, écrivain et poète. Elle s'installera dans la petite chambre, un peu monacale,  derrière la cuisine.. la nécessité du calme.. Elle rédigera là une nouvelle, Quand les volets, qui accompagnera aussi ce travail de mémoires.
A ses côtés une autre amie, Helga, poursuivra l’écriture, difficile, d'une épopée familiale.
Marie et son appareil photo a été conviée aussi pour capturer d'autres images..

Il est temps désormais d'envisager le voyage vers la grande demeure familiale magnifiquement bâtie sur les hauteurs des vignobles  bordelais. Elle nous attend. Elle est l'actrice principale de cette petite mémoire qui s'enroulera ensuite sur la bobine..

Nous passerons un jour tous ensemble là. Un seul jour de tournage..
Le 24 juillet 2012, une vingtaine de personnages se réunissent donc là bas, sur le perron moussu de Soutard.
Chacun découvre à sa façon les lieux.. il y a le potager, le poulailler, le cuvier, les greniers, le parc un peu dévasté par de trop nombreuses tempêtes.. les fleurs sauvages seules osent déranger les herbes folles.. Kamila cueillera ces étonnées pour de vastes bouquets..
Nous dresserons un couvert de fête.. le tire bouchon paternel fera encore résonner un bouchon de liège ..  l'ivresse familiale emplira les verres, une dernière fois.
François nous aura offert ensuite de délicieuses ripailles, de son bar à vins, l'Envers du décor, puisés.. vastes sacs de papier craft qui s’éparpilleront dans l'herbe, sous le somptueux hêtre pourpre..
Y'a de la joie !
Marcus concentre le tournage sur l'espace du bas.. les salons, la salle à manger, les longs corridors, terrains de nos galopades enfantines entre l'univers des grands parents et celui des parents.. notre petite frontière que nous traversions souvent sans permission..

Merci les enfants, mes enfants, de votre présence.

Au revoir forever..

La video de Marcus Kreiss est disponible 
sur demande par mail auprès de IdL. 
Ci-dessous quelques images qui en sont extraites 
de même que l'ouvrage de Sophie Braganti et Frédérique Nalbandian 
©Marcus Kreiss 2012   © Idl 2012   © Sophie Braganti 2012 

      






 "Quand les volets"- Sophie Braganti - Frédérique Nalbandian

        
  
  

mercredi 9 novembre 2016

avec Jérôme Soret

Jérôme Soret.. Il est ce photographe secret qui chemine, un appareil photographique toujours glissé derrière l’écran d'une veste, d'un par-dessus..  un appareil prêt à saisir l'image, celle qui révèlera ce que le regard-notre regard - voudrait tellement conter.. et qui s’échappe déjà tandis que l'artiste installe l'histoire  sur le papier..
Ces photographies sont les instants fugitifs de la mémoire qui, sans artifice, deviennent présences.

Jérôme aimait déambuler avec son ami François.. sillonner les recoins de son  univers rare et poétique, celui où viennent se blottir, pudiques, les presque rien.. les traces.. ses petits cailloux blancs contre l'oubli.. l'ordre et le désordre!
Ce jour de Juin, ces empreintes du temps en fuite se dévoilent sur les cimaises de la Galerie Agathe Gaillard.
Il y a cette corde tendue en ces improbables univers badigeonnés d'une patine indélébile.... des fils noués se tiennent suspendus à cette matrice bienveillante.. des fils, des bouts de ficelle.. en vrac.. ceux la mêmes que je recherche peut être toujours et encore pour recoudre les images du temps en partance.. ou ces bouts qui domptent la courbe des voiles pour d'autres voyages...

Jérôme Soret
Sans titre  " Fils blancs"- Saint Emilion
Tirage sur papier couleur 1/11
acquis en Juin 2012
© Collection IdL 







samedi 5 novembre 2016

avec Nicolas Jardry

Récemment, des amis firent escale sur mon plancher de chêne.. des amis qui ne connaissaient pas encore mon refuge en art, espace de lumière et de découvertes.. oeuvres picorées ça et là au fil du temps, des intentions, des désirs, des hasards et des belles folies aussi !! 

Ici, il n'y a ni ordonnance, ni plan d'accrochage.. pas de scénographie !! non, cette connaissance  n'est pas dans mon savoir faire.. je dirais même que chaque nouvelle oeuvre se glisse ici à sa façon, un peu empesée d'une sorte de timidité, ce même petit pincement ressenti par le nouveau, un jour de rentrée des classes.. 
Elle est " l’étrangère ", celle qui ne sait pas si son allure conviendra aux autres, aux anciennes ! 
Alors la nouvelle est juste posée là, ou ici.. et elle se débrouille !! je ne cherche pas non plus à jongler avec les couleurs, ni avec  les cadres, ni avec  les mensurations..
Il est un peu teinté d'esprit sauvage mon domaine !!

La nouvelle a donc trouvé sa place, toute seule.. elle demeurera un peu au sol, intimidée, entre des fleurs de cristal et un tabouret de sculpteur.. puis elle prendra de la hauteur et viendra tenir compagnie à un magnifique alignement de photographies, oeuvres magistrales de Lucien Clergue, de John Stewart ou de Malik Sidibé..

Ready to fly de Nicolas Jardry est donc adoptée et ses parures de bleu tissées attirèrent ce soir-là tout particulièrement le regard de mes invités!!
Elle est cette oeuvre qui, en La galerie d' Anne Clergue un soir de Mai, dompta aussi mon attention..
Certes l'azur ruisselle sur le papier, mais au-delà de cette palette claquante, c'est autre chose qui troubla mon attention.. le duo !! le multiplié par deux, un étonnement de l'enfance.. le mystère.. l'application du pliage.. la profondeur vertigineuse de la nature.. l' océan..  hissez haut !!



Nicolas Jardry - Ready to fly, Cuglieri 2013.
Tirage pigmentaire numérique
60 X 80 cm. Ex 1/3
© Collection IdL 2016


mercredi 12 octobre 2016

avec Pip Culbert (2)

Pip Culbert... ses dé-coutures!!

Des mouchoirs ainsi déshabillés de leur matière ont déjà galopé sur cette feuille avant de retenir leur géométrie architecturale sur mes cimaises!!

Ce soir, mon regard sera happé par ce petit cadre déposé là, sur un coin de mur, discret et d'une Simplicité  gigantesque.. l'infiniment beau.. blanc.

Le relief à peine perceptible de la couture, seule, évadée du vêtement, de l'objet usuel, pour se présenter ainsi sans artifice..  soudée à sa feuille de papier..
Une écriture en braille, presque.. le désir de laisser le doigt s'attarder sur ces petits bourrelets..  la trace de ce qui fut une poche de chemise, de tablier, de robe.. le savons-nous?? cette poche retint en son temps mille et un petits trésors ou la délicatesse d'un trait de pochette ô combien savamment replié.. élégance!!

La poche!! .. mise à nue!!

Une silhouette fine et légèrement rugueuse.. la trame du coton.. fermons les yeux et invitons notre imagination - un truc d'enfant, ça!  - au rêve.. et si c'était une maison à l'envers, sur pilotis?? ..un toit, quatre murs.. invincibles nous devenons alors, bien à l'abri dans notre cabane de fil..

Merci Pip. Tu as déposé cette oeuvre un jour dans mon jardin d'hiver.. Nous étions alors au verger, à Saignon, sous le grand poirier de Chambre avec Vue.. C'était l'automne.. les feuilles basculaient..

Pip Culbert - Poche décousue - ©Collection IdL




samedi 14 mai 2016

avec Lucy Marshall

Le joli mois de Mai danse dans les ruelles arlésiennes.. premiers chapeaux, premières robes de coton, le soir prolonge ses éclairages.. flâneries.. le teint des dames est saupoudré d'un soupçon de bonne mine, les messieurs flottent dans des chemises de lin, petits drapeaux d’élégance annonçant sans hésitation l'arrivée de l’été.. la légèreté est tendance !

Flair Galerie a invité une artiste australienne.. l'autre face du monde caracole sur les cimaises.. le talent de cet artiste est ourlé d'esprit joyeux.. le dialogue tambourine vite entre les deux pôles de la
terre.. Lucy est lumineuse.. Isabelle Wisniak est rayonnante !!  Notre galeriste a le talent de " dénicher " (nous sommes bien à Flair Galerie !) des artistes venus d'ailleurs, de terroirs et de territoires particuliers.

Le désir de surprendre, attentive toujours à la qualité, l'extrême qualité.
Chaque œuvre, chaque dessin de Lucy Marshall nous entraînent dans une farandole allégée de toute obscurité, de toute densité inquiétante, de tout soupçon de tragédie. La joie est communicative.. Nous parlons art, voyages, l'esprit gourmand et le regard pétillant !!

Nous osons sourire, rire ! Ces instants sont merveilleux.. le projet déjà de nous asseoir tout à l'heure à la même table, place du Forum, festin en attente..la table du Pop'up du Nord Pinus est enchantement. gourmandise, ivresse.. la promesse aussi bien entendu de traverser le monde pour se revoir..

Je descends la rue de la Calade. Le jour ne s'enfuit pas encore et je sais que bientôt le dessin National Pawtrait Gallery distraira avec audace et talent le cours de mes cimaises..
J'aime les traces, les empreintes.. celles que les escargots dessinaient alors sur la terre de l'enfance lors des courses de ces fameux gastéropodes à coquille !
J'aime les petits billets oubliés entre les pages des ouvrages de nos bibliothèques.. reculer dans la vie
d'avant..

J'aime la trace..peut être aussi en souvenir de la visite de Droopy sur mon plateau de chêne…


Lucy Marshall (The Dogophile) National Pawtrait gallery, 2016
Encre pigmentée et aquarelle sur papier 100% coton
29,7 x 42 cm
©Collection IdL



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mercredi 20 avril 2016

avec Franck K. Lundangi

C'est en avril et c'est à Paris.. le temps du salon du dessin contemporain Drawing now, au Carreau du Temple, cœur de Paris.

Ce salon est devenu pour moi une vraie cérémonie!! un rituel, une attente qui fait battre mon âme de petite fille.. Bien sûr, au même moment, Art Paris envahit le Grand Palais.. Art Paris aux stands vastes et élancés, irréprochables.. J'y fus, certes, élève appliquée toujours et un peu alarmée par le mouvement artistique du moment.. une cathédrale comparée à la confidentialité du Carreau du Temple.

Là, sous sa structure historique et désormais métallique (au cours des siècles elle fut construction de bois), le murmure est de rigueur, les voix sont de douceur badigeonnées, comme si la crainte d'effacer les traits de crayon imposait le ton.. un cri serait gommage ! l'impression que les amateurs d'art et de dessin ont glissé leurs pieds dans des pantoufles..

Je parcours les travées, heureuse de retrouver " mes " galeries, attentive aussi à oser gravir le seuil des " inconnues ".. des rendez vous incontournables.. une sorte de club.
Des sourires sans maquillage ni intention aucune de vanité, des yeux vifs et interrogateurs constituent  le langage  des galeristes et des collectionneurs. Chacun connaît la règle du jeu.. ne pas tricher, ne pas fanfaronner.. et, ô étonnement sans cesse renouvelé,  des œuvres plus spécialement s'imposent quelque part dans les strates indomptables de mes envies.. une première sélection..
Je deviens alors chasseresse. Je danse presque entre les stands.. je suis à l'affût, à l'arrêt.. un moment important.. comme à la chasse, ou à la pêche.. savoir attendre, dompter ses envies et.. arrêt sur image..
L'impossibilité alors de renoncer !! c'est terrifiant, ravageur mais ô combien pétillant de calme intérieur aussi.. paradoxe ! Il y a du mystique là-dedans !

L'œuvre de Franck K. Lundangi, The spiritual man dans la Galerie d'Anne de Villepoix sera glissée dans ma besace.. un trophée..
Une aquarelle qui me confie l'eau, la terre, le ciel, un peu Arche de Noé.. Arbre de Vie..
Il y a de la Joie !

 Franck Lundangi - The spiritual man, 2016 
Watercolor on paper - 76x56cm © Collection IdL 



jeudi 24 mars 2016

avec Tatiana Wolska


Le salon du dessin contemporain, Drawing now.

Nous avons déjà déambulé ensemble dans ces travées de chuchotements et de mines de plomb.. Je retrouve les galeries de mes habitudes..  dirigeons nous vite vers la Galerie Papillon... l’éclat des deux sourires de Claudine et Marion.. et sur les cimaises, chaque année, des signatures nouvelles jonchent les toiles.. Tatiana Wolska 
J'apprends..
Je sais l'application de la main, audacieuse et concentrée, seule baguette dirigeant sans tremblement aucun la composition d'une empreinte sur le papier. L’étonnement enivre mes pupilles.. je ne saurai jamais dire ce brin de folie qui, soudain, vient picoter une certaine maîtrise de mes désirs..

Pourquoi un dessin d'encre et d'acrylique vient-il perturber l'ordonnance de mon maintien ? Pourquoi tout voile d'indifférence se trouve-t-il  soudainement arraché à la trame sereine de mes intentions ?
Pourquoi un dessin se précipite-t-il  vers moi ?
Il me conte très certainement, avec des mots grappillés dans les empilements de mes souvenirs, de mes émotions, de mes doutes et de mes victoires, il me conte ce que jamais je ne saurai dénicher sans la magnificence de l'Art.. complices nous devenons !!

Ce dessin lа serait une paupière de cils broussailleux, non peignés.. ou une frange d'herbes plantées dans les dunes pour retenir le sable, là-bas sur les plages de l'Atlantique ?.. d'ailleurs, quelques grains dorés barbotent dans l'eau salée à peine bleutée.. j'aime aussi ce minuscule trait d'encre échappé de la plume.. petit confetti de l'imprévu !

Le printemps n'ose pas encore.. Le ciel de Paris est toujours un peu hivernal, poinçonné de discrètes  intentions de lumière bariolée de renouveau..


Tatiana Wolska - Sans Titre, 2016
(42 X 56 cm) -  Détail
© Collection IdL




mercredi 6 janvier 2016

avec Jenifer Corker

Arles.
Janvier grelotte..
Je grimpe la rue de La Calade, vent debout !! Je sais les oeuvres de Jenifer Corker exposées chez FLAIR Galerie, univers ô combien inattendu d'Isabelle Wisniak.. et de Droopy !
C'est un travail minutieux !
L’œuvre qui retient mon attention est un panorama incroyable pioché tout à la fois dans l'univers de la cartographie - je vous parlais bien de navigation !! - du dessin, du bestiaire.

L'œuvre commence tel un de ces étonnants découpages que je m'efforçais de maîtriser enfant, une épingle calée entre les doigts sensée piqueter un contour.. un contour de fleur, un contour d'animal de basse cour.. un contour de je ne sais plus..
Jenifer coud, dessine, enveloppe de brume de plomb cette bête à deux têtes, à double nom (qui est Oscar ? qui est Milly ?)  étrange et sympathique, ancrée sur un film de toile bis.. impeccable !

Cette bête veille et monte la garde, ici, sur mes cimaises !! elle est fantaisie et drôlerie, raffinement  et délicatesse.

 Oscar et Milly, 2015, calicot, fil à coudre, crayon, encre de calligraphie
 par Jenifer Corker © Collection IdL

Oscar et Milly, 2015. Détail

Oscar et Milly, 2015.Verso
(Cliquer sur les images pour les agrandir)